Pékin étend son influence sur les routes commerciales en Europe et en Afrique. Le cas d’Athènes illustre les opportunités économiques, mais certains pays européens ont manifesté leur perplexité.
En sa qualité de deuxième plus grande économie de la planète, il est normal que les projecteurs du monde entier soient tournés en permanence vers la Chine, des États-Unis à l’Europe, en passant par leur voisin indien. Il est vrai que la croissance du géant asiatique ralentit et plus d’un observateur commence à évoquer une possible récession à l’horizon, le vieillissement de la population, la faible rentabilité des entreprises chinoises. Mais leur programme d’investissement dans le Vieux Continent est difficile à ignorer.
La nouvelle route de la soie
L’attention accordée à l’Europe par la Chine a également été confirmée par la visite du Président Xi Jinping, qui entend relancer la nouvelle route de la soie. Le projet, lancé en 2013, s’intitule « One Belt, One Road » (Une ceinture, une route) et vise à donner à Pékin un rôle central dans le commerce mondial en reliant l’Asie à l’Afrique et à l’Europe. Le véritable objectif de cette stratégie viserait évidemment à placer la République populaire au centre des scénarios géopolitiques et économiques mondiaux grâce à de nouvelles liaisons terrestres et maritimes et à des infrastructures aussi neuves que modernes. Cette initiative repose sur deux axes : le premier partirait de Chine occidentale pour atteindre l’Asie centrale et le Moyen-Orient ainsi que l’Europe du Nord, le second relierait par voie maritime les côtes chinoises à la Méditerranée, en passant naturellement par l’océan Indien.
Un plan d’investissement qui représente près de mille milliards de dollars
Le projet est colossal : pas moins de 900 milliards de dollars pour engager 65 pays qui représentent 40 % du PIB mondial et qui accueillent 65 % de la population de la Terre. Sur le plan des liaisons ferroviaires et routières, des pays comme la Russie, la Pologne et les républiques baltes seraient concernés, tandis que sur le plan maritime les principaux ports espagnols, portugais, français, italiens, grecs, turcs, des Balkans et des républiques du Nord seraient impactés. Il convient de ne pas oublier que plus de 70 % des marchandises qui traversent les frontières européennes (environ 1700 milliards d’euros par an) transitent par les ports et que ces derniers emploient un million et demi de personnes. Il s’agit donc d’un atout majeur pour un partenaire aussi vorace que la Chine.
Investissements chinois dans les ports européens : l’exemple de la Grèce
À travers le Fonds de la route de la soie et l’exploitation des entreprises privées et publiques, Pékin a acquis des parts dans 8 ports européens à travers les Pays-Bas et la Belgique, l’Espagne, la France, l’Italie et la Grèce. À titre d’exemple, en 2008 déjà, la China Ocean Shipping Company (Cosco) avait investi 4,3 milliards de dollars pour gérer deux terminaux dans le port d’Athènes pendant 35 ans. La compagnie a ensuite étendu sa participation jusqu’à devenir l’actionnaire majoritaire de l’Autorité portuaire du Pirée. Et ce n’est pas un hasard si, en l’espace de 6 ans, les volumes de transit ont augmenté de plus de 300 % grâce à des investissements ciblés pour étendre le port.
La France et l’Allemagne sont perplexes
Paris et Berlin n’ont pas caché leurs réserves quant à cette expansion industrielle dirigée par le gouvernement chinois. Le président français Emmanuel Macron, parlant de la nouvelle route de la soie, a déclaré que les nouvelles routes « ne peuvent être celles d’une nouvelle hégémonie et ne peuvent être à sens unique ». Angela Merkel, la chancelière allemande, a également fait remarquer que ces questions économiques cachent probablement quelque chose d’autre et qu’elles peuvent avoir des répercussions dans le domaine des équilibres géopolitiques. En résumé, la Chine ne cesse de diviser.